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les soldats se diriger vers les fourrages et s’en revenir avec des bottes de paille sur le dos.

Un personnage patibulaire, qui nous vit passer sur nos plates haridelles, délia rapidement un cheval attaché par la bride à un arbre et le poussa devant moi en ouvrant et en fermant deux fois la main. C’était une manière d’en demander dix francs. La bête, forte et pas trop endommagée, bride au cou et selle au dos, avait bonne mine : je donnai les dix francs et montai dessus. Ce que voyant, un sergent d’infanterie bavaroise vint à moi et me dit en riant :

— Ce gueux-là a vendu tantôt un arabe superbe vingt francs. Votre cheval ne vaut pas plus de cinq francs.

Il avait l’air bon enfant.

Je lui demandai comment on fêterait cette année Christmas.

— Bah ! me répondit-il gaiement, d’ici là, nous serons dans nos familles et je compte bien faire de mes mains l’arbre de Noël de ma petite sœur Sarah.

— Le roi Wilhem n’a qu’une parole, m’avait dit la veille un père de famille. Il a promis de