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Quelques instants se passèrent, j’étais demeuré debout, attendant la décision du commandant. Il n’avait plus l’air de se douter de ma présence.

— Pardon, commandant, lui dis-je.

Il me regarda de la tête aux pieds et en très mauvais français :

— Bonjour, bonjour, me dit-il. Vous avez permission. Fæhnrich, conduisez.

Je remerciai le fæhnrich et je passai le pont.

À la tête du pont, de chaque côté, deux canons étaient braqués sur le camp, et debout, près des canons, dix hommes de l’artillerie et un officier campaient. À droite et à gauche du camp, d’autres canons ouvraient leurs gueules luisantes de distance en distance, gardés par des canonniers dont la silhouette immobile se détachait à plat, comme des enluminures sur un fond brun.

Un peu en arrière des canons, des postes bavarois, hessois, saxons, groupés et le fusil au pied, formaient une sorte de cordon non interrompu. Des sentinelles se croisaient d’un poste à l’autre et on voyait aller et venir la