Page:Lemonnier - Les Charniers, 1881.djvu/176

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une tour que son partenaire s’obstinait à avancer.

— Au diable ! fit le colonel. Je n’y vois plus.

Le front dans la main, le vieux militaire pleurait : sur sa grosse moustache coulait une larme qui tomba sur la table.

J’ouvre ici une parenthèse.

Comme je m’habillais le lendemain matin, après déjeûner, dans la chambre d’un petit hôtel où nous avions, non sans peine, trouvé à loger, on me remit une carte de la part d’un officier prussien qui demandait à me voir.

Un peu surpris, je fis monter l’officier. C’était l’un des allemands de la veille. Il avait appris, par les gens de l’hôtel, que j’arrivais de Bruxelles, et en français passable, il venait me demander des nouvelles de plusieurs personnes qu’il avait fréquentées dans cette ville. Il se dandinait, me montrant la raie qui coupait en deux ses cheveux chaque fois qu’il s’inclinait, et il effectait une politesse sémillante, souriant de ses grandes dents blanches larges comme des touches de piano.