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cette journée de repos, ayant sous la large visière de leur casquette une tristesse noire, infinie.

Rarement une parole était échangée entre eux, et elle était rapide, dite d’une fois, pour n’y plus revenir. On n’entendait dans la maison, quand ils y étaient, que le traînement des sabots, le bruit de l’ouvrage en train, le souffle de Balt à cause de son chancre, et les accès de toux effrayants de Bast.

Leur vie s’était réglée dès la première heure, et ils continuaient à vivre comme ils avaient toujours vécu, ayant une haine commune des voisins, des intrus, du mariage, un même amour sordide de l’argent, une lésine à laquelle ils sacrifiaient les appétits de leur ventre. Ils prenaient le matin un repas à la chicorée, à midi passaient de l’eau sur le marc et mangeaient du pain