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l’hallali

petits coups de ses talons nus la cuisine et se perdit dans le long couloir.

C’était, du reste, la vérité qu’on la voyait traînant partout avec son godelureau. Une ardeur de petite chèvre en rut l’enrageait après son petit faune aux oreilles acérées comme des cornes de jeune bouc. Elle en oubliait la maison, les repas, la famille, dans son goût d’amour sauvage, sous le rouge automne lascif. Une fois, ils étaient allés dans la forêt dont il lui parlait toujours. Au cœur vert des clairières, ils avaient trouvé un campement de bûcherons avec ses lits de feuilles, ses chaudrons cuisant à la fourchée de quatre piquets et la fumée de ses feux de genêts. Les gens étant à cogner et à scier par les coupes, ils s’étaient même glissés par l’huis et avaient mangé à même une miche, ronde comme une roue de charrette. Tout d’une fois, jolie comme une petite sainte Vierge en soie, avec des miroirs dans les yeux, une biche avait passé, suivie de son faon.

Il lui avait expliqué comment on chassait au furet, au collet ou au fusil ; lui, à douze ans, tuait déjà les lapins à coups de bâton. Ils étaient tous des braconniers dans le pays.

Elle admira sa jactance et sa force.

Presque chaque jour, maintenant, il venait ; elle allait l’attendre dans le bois ou dans les roseaux. À plat sur le ventre, elle chantait douce-