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II


Le paysan, lui, doucement montait le grand escalier, dans le hall d’entrée. Bottés et sanglés, dague à la ceinture, les invités aux chasses jadis y venaient attendre que les valets leur amenassent leurs montures. Au long du mur, dans le crépit éraillé, douze portraits faisaient face à la massive balustrade, sculptée en rinceaux et en feuillages, tous très grands, en pied, seigneurs et dames de haute mine sous leurs pourpoints sombres et leurs corsages de satin ramagé. Un seul, tout d’or et d’acier sous le heaume et la cuirasse, avait été un grand homme de guerre. C’étaient les ancêtres, gentilshommes de tournois, de cour, de salons et de camps, que l’amour et la politique avaient couplés avec le sang bleu des aïeules, gerfauts et colombes dans la volière de la race. À six ans, son père, le baron Gaspar, lui prenant la main, le menait un jour par l’escalier, disant leurs noms l’un après l’autre. À chaque