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ment. Cependant il n’avait pas lâché Jaumart, à cause du salaire sans lequel ils n’auraient pu vivre. Mais il avait fallu payer l’annuité au Gosau, des betteraves et du fourrage sec pour la vache, et le surplus les laissant en une débine noire, à deux ils avaient traîné le vieux sur la route pour mendier.

L’été qui vint, le champ ne décoléra pas : sa hargne tenait bon ; un peu moins de cailloux seulement, et un peu plus de mauvaises herbes ; et pour comble une jachère leur souffla ses semences folles en tourbillons. Ils durent batailler à nouveau contre les moineaux, les chenilles, les limaces, les vers et les mouchettes, sans repos ; et ils sentaient sur eux l’ancienne malédiction toujours. Tout dans les clos germait, levait, fleurissait ; la fructification battait son plein ; et la même ombre de mort pesait sur leur labeur inutile. Une fureur sombre ne les quitta plus ; pendant un mois il évita la messe, jugeant la divinité vaine aux hommes, mais elle y alla pour lui, avec une ferveur