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tisses vaseuses et les humidités moisies des caveaux. À peine fleuris, les pois s’étiolèrent ; il vint aux haricots des cosses débiles ; celles des fèves de marais se recroquevillèrent. La germination finie, leur terre retombait à ses fainéantises anciennes, à cette torpeur lourde de friche qui, six ans à peu près durant, l’avait laissée comme épuisée, dans la vie des autres. Rapidement, la sève s’était tarie ; une chlorose incurable semblait arrêter la fructification ; et la Lise, les yeux errants sur cette désolation, quelquefois pensait à son ventre qui, comme le champ, ne devait plus concevoir. Du village, le piaillement des petits enfants lui arrivait, avec les gronderies des mères, et comme l’école n’était pas éloignée, elle entendait aussi la douceur monotone des voix épelant toutes à l’unisson l’alphabet. Dans la maison régnait un ennui froid ; l’air sans oiseaux continuait là, dans une paix noire de foyer sans couvée. Par moment, le râle de Caco montait comme une fin d’agonie, et à midi, sur ses deux bâtons, il se traînait