Page:Lemonnier - Ceux de la glèbe, 1889.djvu/47

Cette page a été validée par deux contributeurs.

puisqu’il ne voulait pas, elle lui garda sa foi tout de même, se reprenant, tardive, à une virginité dès la nubilité résignée, habituée à la soumission, sans révolte contre cette virilité abolie qui ne la ferait plus germer.

On l’appelait la grande Lise ; son nom à lui, avait fini par se perdre dans un sobriquet : le Forgeu. Et comme il vivait sur une vingtaine de mots qu’il répétait constamment, il passait pour simple d’esprit.

Deux de ces mots s’appliquaient invariablement à l’idée de travailler, l’un qui était « forger », l’autre qui était « manœuvrer », mais avec une différence dans les significations, le premier employé pour les coups de collier, le second pour le labeur courant. Et toute l’activité de son intelligence sans cesse aboutissait à ces deux vocables qui suppléaient à tous les autres et dans lesquels se résumait la fatalité de sa condition d’ouvrier de la terre, toujours ouvrant et mis au monde pour toujours ouvrer. Jusqu’à quinze ans, il avait, chez le ferrant, ventilé