Page:Lemonnier - Ceux de la glèbe, 1889.djvu/219

Cette page a été validée par deux contributeurs.

daille, à la longue, finissait par redouter comme le souffle d’un vent mauvais sur cette partie de sa procession, dont il percevait, mais vaguement, le lointain tumulte. D’ailleurs, chez la plupart, les ferments de la bière et du genièvre travaillaient ; cette chauffe de soleil à plomb agitait la cuvée des estomacs ; en outre, comme pour donner raison à Ladrière, une luxure résultait du tassement des mâles et des femelles.

Heureusement on entrait dans les bois du comte. Une ombre glauque s’abattit des feuillages, verdissant les faces ; la marche s’étouffa dans le sable mou d’une grande allée ; et, les chants s’étant interrompus, la foule, recuite au brasier des chemins sans arbres, humait bruyamment la moiteur fraîche des taillis. Mais des industriels avaient attendu le cortège au passage ; un homme portait sur l’épaule un mât garni de petits moulins en papier, dont les ailes tournaient ; des femmes se levèrent qui offraient des verres de liqueur ; et un marchand de coco, sa fontaine accrochée par des bretelles,