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le devoir et qui est la négation de la conscience, peut-être alors j’aurais eu le droit de la mépriser à cause de sa double imposture. Elle me fût restée bien plus sacrée en suivant un autre homme aimé.

Oh ! comme à présent elle se roulait dans mes bras ! Elle m’appartenait de toute sa volonté ; la mienne ne comptait pas dans l’abandon que pour la seconde fois elle me faisait librement de sa vie. Ses petites mamelles s’offrirent comme si jamais cet homme n’était venu, comme si avant ce temps je ne les eusse point encore pressées sous mes lèvres. Elles me disaient : « Vois, nous sommes vierges ; aucun homme encore n’a effleuré nos boutons roses et l’enfant n’en a pas exprimé le lait. » Ses cheveux aussi m’entourèrent comme s’ils prenaient leur part de l’acte conscient où elle voulut se rendre à moi. Ils avaient la beauté animée et vivante de son désir ; une âme était descendue jusque dans le plus jeune et le plus léger des duvets de sa nuque. « Ô chère Ève, lui dis-je en l’entraînant, viens là-bas où il y a plus d’ombre et où le rossignol a chanté.