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comme toi et moi dans le matin plein de roses ? Le loriot n’a que quatre notes comme ta flûte et cela suffit à exprimer toute la joie des bois. » Pour amuser les petits, elle avançait les lèvres et imitait leur chant. Et bien avant moi elle avait compris la chanson de la grive ; celle-ci lui révéla l’amour. Le vent a autant de voix qu’il y a de feuillages et chaque essence du bois tremble différemment comme chaque oiseau a son chant et chaque insecte son cri. Le silence non plus n’est pas deux fois le même silence. Il y a des heures où on ne s’entend plus tant il fait de bruit à force d’être du silence. Et toutes ces choses sont la nuance infinie des innombrables âmes de la nature. Avec ses fibres fines et longues, elle les percevait bien mieux que moi.

La poitrine de l’homme est une forge où bat l’héroïsme des marteaux. Mais la femme confine au magnétisme et aux arcanes. Elle a la chevelure des arbres, la voix des oiseaux et des fontaines. Ses hanches sinueuses imitent la grâce du vallon ; dans sa mamelle tient le prodige de la genèse. Et une vie météori-