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XIX


Je pris une après-midi ma carabine. Je descendis vers le cœur frais de la forêt. Il y avait un assez long temps déjà que je ne partais plus en chasse. Un jour, ayant mangé d’une chair sauvage du bois, nous vîmes que nous avions du sang aux dents. Aussitôt nous détournâmes les yeux ; cette chose rouge nous levait le cœur. Et jusqu’au soir nous n’osâmes nous baiser sur la bouche, songeant tous les deux qu’il y avait eu là le sang d’une vie. Je m’en allai donc devant moi, dans l’odeur et la beauté de la nature. Je n’aurais pu dire