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XV


Je suis allé dans la forêt. Avec la cognée j’ai abattu un orme et un chêne. Je les ai choisis mûrs et déjà blessés, frappés par la foudre. Ainsi j’ai épargné les essences plus vitales. J’ai porté le coup au cœur : mon geste était terrible et doux comme celui du sacrificateur. Toute la terre a mugi de douleur. Et puis avec un bousillage de terre et de joncs j’ai bâti le hangar ; de la base du chêne j’ai fait mon établi. Je passe là les jours de vent et de pluie, calculant et travaillant. Voici l’orme et voilà le chêne, par éclats, avec le bel aubier saignant. J’y taille