Page:Lemerre - Anthologie des poètes français du XIXème siècle, t3, 1888.djvu/60

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
48
ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.



SOUPIR




Mon âme vers ton front où rêve, ô calme sœur,
Un automne jonché de taches de rousseur,
Et vers le ciel errant de ton œil angélique,
Monte, comme dans un jardin mélancolique,
Fidèle un blanc jet d’eau soupire vers l’Azur !
— Vers l’Azur attendri d’Octobre pâle et pur
Oui mire aux grands bassins sa langueur infinie,
Et laisse, sur l’eau morte où la fauve agonie
Des feuilles erre au vent et creuse un froid sillon,
Se traîner le soleil jaune d’un long rayon.


____________



SONNET




Le vierge, le vivace et le bel aujourd’hui,
Va-t-il nous déchirer avec un coup d’aile ivre
Ce lac dur oublié que hante sous le givre
Le transparent, glacier des vols qui n’ont pas fui ?

Un cygne d’autrefois se souvient que c’est lui,
Magnifique mais qui sans espoir se délivre
Pour n’avoir pas chanté la région où vivre
Quand du stérile hiver a resplendi l’ennui.

Tout son col secouera cette blanche agonie
Par l’espace infligée à l’oiseau qui le nie,
Mais non l’horreur du sol où le plumage est pris.