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CAMILLE MACAIGNE.


Je le ravis et je l’emporte,
Et je me retourne vingt fois
Vers ce village qui m’apporte
L’enivrant parfum de ses bois.


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L’HIVER
À Monsieur Victor de Laprade




Les vents glacés du Nord ont émondé les branches
Où les oiseaux jaseurs préludaient à leurs chants.
Les bouleaux ont frémi sous leurs écorces blanches,
Tout est mort dans les bois, tout est mort dans les champs.

Comme un vaste tombeau, ma forêt solitaire
Résonne sous les coups des vents impétueux,
Et le chêne attristé, dépouillé de mystère,
Frissonne avec ennui sous ses grands flancs rugueux.

Ce roi, que vous avez dans un divin langage
Autrefois célébré comme il le méritait,
Je n’irai plus lui rendre un poétique hommage
Comme au temps où l’Avril tout rayonnant chantait.

Je n’irai plus bercer mes rêves de jeunesse
Sous son dais tamisant la lumière des cieux,
Et j’attendrai, pensif, que le printemps renaisse
Avant d’aller courir près des papillons bleus.

Vos vers tout éclatants d’harmonie et de nombre
Que je buvais, puisant à la source du Beau,
Je ne les lirai plus sous ces arbres pleins d’ombre,
Qui du soleil de Juin me voilaient le flambeau.