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THÉODORE DE BANVILLE.


Et vous, poètes, pleins comme moi de tendresse,
                     Qui relirez mes vers
Sur l’herbe, en regardant votre jeune maîtresse
                     Et les feuillages verts ! .

Vous les lirez, enfants à chevelure blonde,
                     Cœurs tout extasiés,
Quand mon cœur dormira sous la terre féconde
                     Au milieu des rosiers.

Mais moi, vêtu de pourpre, en d’éternelles fêtes
                     Dont je prendrai ma part,
Je boirai le nectar au séjour des poètes,
                     À côté de Ronsard.

Là, dans ces lieux où tout a des splendeurs divines,
                     Ondes, lumière, accords,
Nos yeux s’enivreront de formes féminines
                     Plus belles que des corps ;

Et tous les deux, parmi des spectacles féeriques
                     Qui dureront toujours,
Nous nous raconterons nos batailles lyriques
                     Et nos belles amours.

Vous cependant, mes fils, nés pour la poésie
                     Et l’ode aux flots vainqueurs,
Vous puiserez la joie au fleuve d’ambroisie
                     Qui coula de nos cœurs.

Comme, aujourd’hui rêveur près de quelque fontaine,
                     Je redemande en vain
Le secret des amours de Marie et d’Hélène
                     À mon maître divin,