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LOUIS BOUILHET.


Ils se levèrent sans effort,
Le calme au front, l’orgueil dans l’âme,
Doux et polis devant la Mort,
Comme auprès d’une grande dame.

Le jeune au vieux cédait le pas
Avec des grâces enfantines ;
L’urbanité de leur trépas
Fit un salon des guillotines.

On eût dit, à les voir venir
Vers les sanglantes boucheries,
Qu’ils récitaient, pour mieux finir,
L’oraison des galanteries ;

Et leur tête, en ces jours ardents
Où le peuple agitait sa foudre,
Tomba — le calembour aux dents —
Avec un nuage de poudre !…

(Dernières Chansons)







LE TUNG-WHANG-FUNG




La fleur Ing-wha, petite et pourtant des plus belles,
N’ouvre qu’à Ching-tu-fu son calice odorant ;
Et l’oiseau Tung-whang-fung est tout juste assez grand
Pour couvrir cette fleur en tendant ses deux ailes.

Et l’oiseau dit sa peine à la fleur qui sourit,
Et la fleur est de pourpre, et l’oiseau lui ressemble,
Et l’on ne sait pas trop, quand on les voit ensemble,
Si c’est la fleur qui chante, ou l’oiseau qui fleurit.