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L’ART POÉTIQUE FRANÇAIS.

du Parnasse, aidé dans cette exécution par Molière, après avoir plaidé pour la raison, le bon sens et la logique contre les mauvais auteurs, et fait l’avocat, il fait ensuite le juge, donne aux uns la première place et relègue les autres à la dernière, dans l’ombre et l’oubli, avec tant de souveraine équité que la postérité n’a cassé aucun de ses arrêts ; enfin, il se présente en législateur^ et, qu’on l’aime ou non, son Art Poétique reste un monument, respecté des âges et des hommes, bien que plusieurs l’insultent et le lapident, et qu’on en critique, à bon droit souvent, la matière et la structure.

Il n’y a rien de tel chez Vauquelin. Nous n’appellerons pas son livre le code de l’école de Ronsard. Mal ordonné, mal distribué, peu rigoureux, il n’a rien d’un code. Réservons ce titre au manifeste de du Bellay, où, sous l’enthousiasme, la fougue, l’emportement et une apparence de libre désordre, se développe et s’impose une doctrine des plus impérieuoes (1). Du Bellay est un réformateur, un fondateur, un. chef d’armée : il veut qu’on obéisse sans discuter. Vauquelin est un historien, curieux et au courant, qui dit tout ce qu’il sait et qui en dit trop. De bonne heure, après une première escarmouche poétique, qui

(i) Cf. Sainte-Beuve : « Du Bellay, à son moment, est un classique dans toute la force du terme… La poétique de Du Bellay.., elle aida puissamment à déblayer le terrain, à faire le champ net et à remettre la littératuie dans une large voie classique, dans une direction qui, en définitive, n’a pas si mal abouti. Après tout, le livret de Du Bellay a amorcé la voie qui, agrandie avec le temps et ai)lanie, et le génie de la France s’en mêlant, est devenue la route royale de Louis XIV. » Nouveaux Lundis, XIII, 284, 292.