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& les plus excellens Commentateurs sur ces endroits obscurs, & peutestre qu’ils abandonneront ensuite leur première pensée & qu’ils reviendront à celle des Traducteurs : car il leur est arrivé à euxmêmes qu’ayant esté cinq ans sans lire leur traduction, & l’ayant reprise ensuite pour l’examiner comme l’ouvrage d’un autre, lorsqu’ils sont tombez sur quelquesunes de ces expressions de S. Paul fort embarassées dans les paroles & obscures dans le sens, ils ont esté choquez d’abord de la manière dont ils les avoient traduites ; mais ayant consumé ensuite les Commentateurs les plus considérables anciens & nouveaux, & ayant bien examiné les paroles & toute la suite de Saint Paul, ils ont reconnu que ce qui les avoit frappez d’abord n’avoit rien de solide, & que le sens qui paroissoit vrai estant faux, celuy qui paroissoit faux estoit véritable. Il est donc nécessaire dans ces rencontres de ne se point prévenir, & de peser tout avec une exacte circonspection ; ce qui n’empêche pas qu’on ne croie que des personnes sçavantes & éclairées pourront avoir des vües que l’on n’a point euës, & qui pourroient contribuer beaucoup à l’éclaircissement de ces lieux obscurs. Car encore qu’en traduisant Saint Paul on ait eu grand soin de consulter tout ce qu’en ont dit les SS. Peres qui l’ont expliqué, & les plus excellens Interprètes d’entre les auteurs nouveaux, & qu’on ait esté quelquefois plusieurs heures pour déterminer comment on exprimeroit une seule ligne, néanmoins on est persuadé qu’on auroit besoin d’une multitude d’esprits, de jugemens & de lumieres, pour achever en quelque sorte la traduction d’un Livre qui est si divin dans ses moindres paroles, si profond dans ses sens, & si élevé au dessus des pensées & de l’intelligence de tous les hommes.