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la découverte du continent américain. Je me souvenais que cette terre neuve fut d’abord noyée dans le sang par la méchanceté et la rapacité des hommes et qu’elle s’en était vengée en empoisonnant chez nous les sources de la vie. Puis les gens qui venaient de là ne me plaisaient point. Le type du Yankee offensait ma douceur et ma naturelle indolence. Oh ! ces hommes qui ne sont au monde que pour construire des chemins de fer et des machines, exploiter des mines, perdre et refaire dix fois leur fortune, qui ne rêvent point, qui ne sont point paresseux et qui, au milieu de cette vie acharnée aux biens de la terre, gardent le besoin de se mettre en règle avec l’Inconnaissable comme avec un client ou un créancier et d’être les fidèles d’une des trente-six mille Églises que le libre examen a tirées de la Bible ! O le merveilleux amalgame du sentiment religieux et de la plus égoïste entente de la vie pratique ! O l’énorme et exhilarante hypocrisie ! J’étais scandalisé qu’il fût dans le caractère de cette race de rechercher les biens matériels avec la fureur la plus éloignée de l’esprit de l’Évangile et, en même temps, de tenir absolument à avoir Dieu pour soi dans une besogne évidemment suspecte à Dieu et à communiquer