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quoi as-tu peur ? Va, l’ordre ancien empêche moins de violences qu’il ne consacre d’iniquités : il n’est donc qu’une longue, qu’une effroyable erreur, et, comme toutes ses parties se tiennent, l’améliorer est impossible : il faut le renouveler tout entier, et cela ne se peut que par des renoncements tels que le nôtre ou par les inévitables violences des masses déshéritées… Tu penses peut-être que l’ordre nouveau ne vaudrait pas mieux ? Qu’en sais-tu ? Et quand même ! « A chacun son tour ! » serait déjà une grossière formule de justice… Mais moi, j’ai confiance : le monde futur sera meilleur, puisqu’il sera différent… Je ne puis t’expliquer, mais j’ai des amis qui savent… Viens : nous ferons le bien ; nous vivrons tout près de la nature, non loin des humbles, parmi lesquels sont les vrais grands. Pour moi, jusqu’au jour où je t’ai rencontré, je n’ai jamais été meilleure ni si heureuse que lorsque j’ai vécu de mon travail et coudoyé le peuple… Viens, viens : tu connaîtras enfin la joie d’une âme libre et, par là, fraternelle au monde entier… Et, si je n’ai pu être au prince de Marbourg, ah ! comme, alors, je serai à toi, mon Hermann ! Dis, le veux-tu ?

C’est ainsi que son âme chimérique de jadis continuait