Page:Lemaître - Les Rois, 1893, éd2.djvu/298

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Moi ? Vous le savez, Frida, ce que j’ai fait.

— Pauvre ami !

— Vous ne m’en avez pas voulu ?

— Je vous ai plaint de tout mon cœur. Vous avez tant dû souffrir !

— Et ce n’est pas fini, Frida. J’ai commencé : il faut que j’aille jusqu’au bout. Je n’ai fait que refouler des colères et épouvanter des détresses qui continuent à gronder sourdement. Je maintiens l’ordre public par la terreur, comme si j’étais un tyran. Et, si ce qui couve éclate un jour, eh bien, nous tuerons encore : il n’y a que le premier sang qui coûte…

— Oh ! pas cela, Hermann ! pas cela !

Suppliante, elle tendait ses deux mains vers la bouche d’Hermann, comme pour y arrêter les mauvaises paroles… Mais lui continuait sans la regarder :

— Alors quoi ? Que faire ? Pour ne pas douter de mon devoir et pour le remplir sans trouble, il me faudrait ici l’âme du plus dur de mes durs aïeux, et je n’ai, moi, qu’un pauvre cœur trop tendre, que la douleur d’autrui émeut jusqu’au fond, et un pauvre esprit inquiet, qui n’est même pas sûr que ce que j’ai à défendre