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de cérémonial, ce n’était que par nécessité, mais encore ils sentaient comme de simples particuliers, et toutes les maladies morales du siècle envahissaient les maisons souveraines.

Et, dans une tristesse grandissante, le vieux roi passait en revue l’almanach des souverains en cette année 1900. Ici, une impératrice névrosée, empoisonnée de morphine et publiquement amie d’une écuyère de cirque. Là, une reine écrivassière qui, pouvant exercer le métier de reine, préférait celui d’homme de lettres, mendiait l’approbation de ses confrères bourgeois, se faisait imprimer dans toutes les langues et concourait pour les prix des Académies. Ailleurs, un roi morose, qui ne se montrait jamais à ses sujets, qui ne songeait qu’à faire des économies pour organiser des voyages scientifiques et qui n’aspirait qu’au renom de bon géographe. Non loin, un prince mélomane à l’âme cabotine s’était noyé une nuit, parmi ses cygnes, dans un lac des _Niebelungen_ aux rives machinées en décors d’opéra. Un autre prince s’était suicidé avec sa maîtresse ; un autre avait épousé une danseuse… C’étaient, depuis quelques années, les maisons royales qui fournissaient, à proportion,