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dans sa lettre les vues et les projets d’Hermann, lui vantait la générosité et la bonté du prince, la suppliait, d’y croire, de ne point entraver son œuvre, de prêcher au peuple la confiance et la patience.

Audotia ne répondit point.

Lorsque Frida apprit, par un billet d’Hermann, l’émeute et la répression sanglante, il se passa en elle quelque chose de singulier. Certes, la nouvelle la rendit malheureuse ; mais il lui semblait qu’elle aurait dû l’être plus encore et d’une autre façon. Elle comprenait que ce qui venait d’arriver était horrible, qu’elle _devait_ demander des comptes à Hermann, que lui-même _devait_ s’attendre à ce qu’elle lui en demandât… Et pourtant, ce qui la désolait, c’était moins la banqueroute, pour longtemps irréparable, de ses plus chères idées que la souffrance de son ami. Quoi qu’elle pût faire, elle songeait moins au peuple qu’à Hermann. Elle se figurait son désespoir, se promettait de ne lui adresser aucun reproche, même indirect, et, secrètement, se faisait d’avance une douceur de le consoler.

Apparemment, en dépit de ses lectures et de ses efforts pour persévérer dans sa foi, le tranquille sortilège des grands bois agissait sur