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manière de bélier, les timons d’un tombereau. Des hommes se faisaient la courte échelle et tâchaient de se hisser jusqu’aux fenêtres du premier étage. Toutes les vitres de cette partie du palais tombaient avec fracas sous une grêle de pierres, et, comme elles rebondissaient, en même temps que les projectiles, sur les têtes des assiégeants, la fureur du peuple redoublait, pareille à celle d’un aliéné qui se blesse lui-même. Une clameur continue emplissait l’air. Plusieurs drapeaux noirs flottaient, ballottés dans les remous de la foule, comme des oiseaux de funèbre augure sur une mer démontée.

Alors, barrant toute l’avenue, parut un escadron de cuirassiers, sorti de la cour intérieure du palais par une des portes de l’aile droite et qui venait prendre la multitude à revers. Les cavaliers s’arrêtèrent. Hermann vit le geste de l’officier faisant les trois sommations, qui restèrent inutiles. Les cavaliers reprirent leur marche, lentement. Des remous plus forts parcoururent la foule ; mais elle ne se dispersa point. Quand le premier rang des chevaux fut sur elle, elle sembla se gonfler comme le bourrelet d’une flaque d’eau qu’on balaye. Des têtes disparurent, submergées dans ce