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tout à l’heure, Hermann avait-il maintenant le coeur serré d’angoisse ?

Il tournait le dos à son frère ; mais il sentait derrière lui le grand nez, les yeux à pochettes, toute la personne d’Otto le railler méchamment. Il se retourna d’un mouvement brusque :

— Qu’as-tu à sourire ?

— Je songe, dit Otto, que tu auras beau faire : tu finiras, bon gré mal gré, par où tu aurais dû commencer. Va, va, j’aurai le plaisir exquis de te voir tirer sur ce bon peuple en qui tu as tant de confiance et que tu aimes tant.

— Mais c’est abominable, ce que tu dis là !

— En quoi ? Je constate ce qui est. Qui espères-tu tromper ? Les sentiments que tu affiches sont contradictoires à ta fonction. Si tu les éprouvais réellement, ou si tu étais capable de les suivre jusqu’au bout, tu n’aurais qu’une chose à faire : t’en aller. Or tu ne t’en iras pas. Tu resteras pour nous défendre--à coups de fusil s’il le faut--et tu massacreras de pauvres diables, parmi lesquels il y aura certainement quelques braves gens, parce que tu ne pourras pas faire autrement. Te voir patauger dans ces contradictions, ce sera ma première vengeance, à moi qui ne fais pas de