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soûl, cela les soulagera, et cela même les détournera de mal faire. Pourquoi pas ?

— Parce que cela est impossible.

— Pourquoi ?

— Parce que cela ne s’est jamais vu.

— Cela ne s’est jamais vu parce qu’on n’a jamais voulu le voir. Écoutez, mon cher Hellborn. Au fond, ce que le peuple a résolu de faire ne me paraît point, à moi, illégitime. Je lui avais donné de grandes espérances. Elles ont été déçues, non par ma faute, vous le savez. J’ai encore l’écoeurement des égoïsmes, des duplicités, des lâchetés dont la dernière assemblée m’a offert le spectacle. Les ouvriers, à qui l’espoir des réformes politiques avait fait prendre patience et qui s’étaient rejetés sur cette pâture, ceux surtout qui, uniquement à cause de cela, avaient consenti à ne point prolonger les grèves, s’aperçoivent qu’ils ont été dupes. Les grèves ont recommencé : je ne m’en étonne ni ne m’en indigne. Les déshérités réclament maintenant le suffrage universel. Je ne dis point qu’il faille le leur accorder tout de suite, car j’en connais les dangers et les mensonges. Et, pourtant, quand on ne croit plus au droit divin, le suffrage universel reste peut-être la dernière source possible de l’autorité :