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toute réflexion faite, le cens électoral avait été fixé beaucoup trop bas dans le projet primitif. Il proposait de l’élever à vingt-cinq florins. Il n’en parlait pas moins de justice, de liberté, d’égalité. Mais Hermann eut l’impression que ces mots, dont l’avocat avait vécu, auxquels il devait sa fortune et sa renommée, il les prononçait sans les sentir, peut-être sans les comprendre, et que ses croyances politiques étaient pour lui ce que sont les croyances religieuses pour beaucoup de gens du monde. Et la constatation de cette hypocrisie, aussi vile et plus funeste que l’autre, lui fut pénible.

Une autre fois, Hellborn expliqua au prince qu’on risque de tout perdre en voulant tout gagner, que les grands changements ne se font pas si vite ; enfin, qu’il était d’avis que le tiers au moins de la Chambre des représentants fût nommé par le roi. Et, dans le cours de l’entretien, il affectait des airs d’homme supérieur, disait en souriant qu’il y a des injustices inévitables, qu’il faut bien en prendre son parti, que le peuple est un enfant incapable de se gouverner lui-même, qu’il suffit de l’amuser par des promesses, que d’ailleurs « tout cela durera bien autant que nous… » De ce jour, Hermann prit son ministre en horreur,