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avec lui un exemplaire de l’_Odyssée_… Mais, peu après, il jugea Homère entaché d’artifice. La littérature, même dans sa période primitive, lui apparut comme la plus sotte des illusions : n’était-il pas inepte de dépenser sa vie à façonner de vaines représentations de la vie ?

Sa simplicité reconquise se traduisit par une nouvelle sorte d’apparente excentricité. Il fit cette découverte que le premier devoir de l’homme est d’exercer son corps pour en accroître la beauté. Il résolut de s’adonner à tous les sports, et principalement aux jeux du cirque. Il hanta les clowns et les gymnastes et fit de quelques-uns ses amis. Mais, comme il avait les membres paresseux et lents et qu’il n’arrivait pas à être seulement un jongleur passable, il allait se déprendre de ce caprice-là comme des autres, quand il rencontra, dans un cirque de Marbourg, la petite équilibriste Lollia Tosli.

Brune, ambrée, les jambes longues, la gorge petite, le front bombé, la bouche naïve et sérieuse, les hanches et le torse roulés dans les plis en spirale d’une soie vieux rose, elle se dressait là-haut, dans les frises, sur un léger trapèze où, sans toucher aux cordes, elle se balançait lentement. Puis, sur l’étroit bâton mobile,