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culte. Les cérémonies des réunions publiques, avec homélies, mémento des saints, célébration des dates sanglantes ou glorieuses, étaient ses messes et ses vêpres. Cette fille sans patrie et, jusque-là, sans religion (de bonne heure elle avait renoncé aux croyances et aux pratiques de l’orthodoxie russe) rencontrait ainsi, dans le rêve socialiste, une religion complète, où pouvaient se satisfaire tous les besoins de son imagination et de son cœur. Et elle s’exaltait d’autant plus dans sa foi que cette Église révolutionnaire dont elle faisait partie vivait à demi dans le mystère, avait des airs d’Église persécutée ou, du moins, réprouvée par la société régulière, rejetée en dehors d’elle et un peu conspiratrice et souterraine…

C’est à ce moment que « la duchesse » fit proposer à Frida une place de demoiselle de compagnie chez la comtesse de Winden, dont le mari était conseiller à l’ambassade d’Alfanie.

Frida refusa d’abord, malgré les supplications de sa mère. Madame de Thalberg n’avait point désapprouvé les idées nouvelles de Frida. Passive et molle, la bonne dame était devenue elle-même vaguement révolutionnaire, en haine de sa pauvreté, tout comme elle fût demeurée conservatrice,