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s’établir et subsister sans une immense bonne volonté de tous les hommes. Et parce que Frida était capable, pour sa part, des vertus qui seules eussent rendu cette utopie réalisable, elle la croyait réalisable en effet. Rêve d’égoïsme brutal chez la plupart des « compagnons », le socialisme était pour elle un rêve de sacrifice.

Ce qui l’attirait aussi, c’était ce qu’il y a de religieux dans l’état d’esprit créé par la foi socialiste chez les hommes qui ne sont pas méchants. Car c’est bien une foi. Frida était parfaitement insensible aux objections. Comment ces choses rêvées arriveraient-elles ? Elle ne savait ; mais ces choses _devaient_ arriver. Les plus savants disaient : « C’est la loi de l’évolution », comme on dit dans d’autres religions : « C’est la volonté de Dieu ». La disposition d’âme des communistes vertueux n’est peut-être pas fort différente de celle des premiers chrétiens, quand ils attendaient une cité de Dieu terrestre et croyaient à son proche avènement, quoique le monde romain opposât assurément autant d’obstacles à leur songe que notre monde peut en opposer au songe des révolutionnaires.

Outre la foi et l’espérance, Frida retrouvait un