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Le lendemain, Frida, qui s’était informée, vint remercier sa bienfaitrice. Elle lui conta son histoire. Audotia, en dépit de son cosmopolitisme, ne put apprendre sans émotion que Frida était sa compatriote. Et, quand elle sut de qui Frida était la petite-fille, elle l’embrassa maternellement.

— Mon enfant, dit la vieille révolutionnaire, je parlerai de vous à la duchesse.

Une récente amie d’Audotia, cette inquiète et théâtrale duchesse de Montcernay, dont les fantaisies généreuses occupaient tout Paris. Très supérieure par les sentiments à la vie de luxe, de représentation mondaine, de préjugés décents et de bienfaisance tempérée, bref, à toute la pauvre vie de grande dame que son nom et sa fortune semblaient lui imposer, elle n’avait pu s’y tenir longtemps. Elle avait commencé, un peu banalement, par « encourager les arts » et avait fait elle-même de médiocres tableaux et d’assez méchants vers ; puis elle avait bravement sacrifié quelques millions dans de vagues entreprises de politique sentimentale et de démocratie évangélique. Enfin, elle s’était ruée dans la philanthropie, bâtissant des orphelinats et des maisons de retraite d’une tenue et d’un aménagement aussi coûteux que les écuries