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et l’amitié de l’empereur : c’est pour cela qu’il fut si libre et put tenter de si vaillantes entreprises. Il jugeait que l’empire devait d’autant plus faire pour le peuple que le peuple avait abdiqué entre ses mains. Lors donc que Napoléon III fit un ministère libéral, M. Duruy se trouva plus libéral, et bien autrement, que ce ministère ; en sorte que le souverain, devenu constitutionnel, dut se séparer du serviteur trop hardi qu’il avait pu maintenir au temps de son absolutisme.

Tranquillement, comme Cincinnatus à sa charrue, M. Victor Duruy retourna à son Histoire des Romains. Il changeait ainsi de besogne, mais non de pensée, et ne quittait point le service de la France. Irréprochable unité de dessein dans cette longue vie ! C’est un ancien projet d’histoire de France qui l’avait conduit à écrire l’histoire de Rome et l’histoire de la Grèce. Il disait, dans l’avant-propos de celle-ci, quelques années avant sa mort : « Il y a plus d’un demi-siècle, élève de troisième année à l’École normale, j’avais, avec l’ambition ordinaire à cet âge, formé le projet de consacrer ma vie scientifique à écrire une Histoire de France en huit ou dix volumes. Devenu professeur, je me mis à l’œuvre ; mais, en sondant notre vieux sol gaulois, j’y rencontrai le fond romain, et pour le bien connaître je m’en allai à Rome. Une fois là, je reconnus que la Grèce avait exercé sur la civilisation romaine une puissante influence ; il fallait donc