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fort bien. L’empereur le prit comme il était. Cela fait honneur à tous deux.

En février 1861, M. Duruy était nommé maître de conférences à l’École normale et inspecteur de l’Académie de Paris ; en février 1862, inspecteur général ; la même année, professeur d’histoire à l’École polytechnique. Il avait passé la cinquantaine, était d’un mérite reconnu, et l’un des professeurs les plus en vue de l’Université. Son avancement ne parut anormal à personne dans sa rapidité tardive.

Or, le 23 juin 1862, étant à Moulins en tournée d’inspection, une dépêche lui apprit qu’il était nommé ministre de l’Instruction publique. Il vit le lendemain l’empereur, qui lui dit simplement : « Ça ira bien. » Et ça alla très bien.

Le nouveau ministre conçut sa tâche dans toute son étendue. Il reprit, très franchement, l’œuvre ébauchée par la Convention nationale. Il était lui-même, par sa foi philosophique et sa conception de la cité, un Français de la Révolution, mais muni d’expérience historique, et de prudence et d’obstination romaines : quelque chose comme un idéologue pratique (je vous prie de donner au premier de ces deux mots son plus beau sens). Il se dit que depuis un demi-siècle, la classe dirigeante, par égoïsme ou par hypocrisie, avait trahi sa mission d’une façon générale en limitant à elle-même le bienfait de la Révolution d’où elle était née, et particulièrement en laissant languir l’enseignement public. Il se dit