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c’est sans doute parce que, dans la pensée de Molière, l’imposture du personnage est complète, qu’il l’a nommé l’Imposteur. Voyez aussi comme, au premier acte, il définit, par la bouche de Cléante, l’espèce à laquelle appartient Tartuffe, et ce qu’il dit de ces « francs charlatans »

  De qui la sacrilège et trompeuse grimace
  Abuse impunément, et se joue à leur gré
  De ce qu’ont les mortels de plus saint et sacré…..

Ajoutez que c’est surtout de nos jours qu’on s’est plié à concevoir le mélange de la sincérité des croyances et de l’hypocrisie ou de la scélératesse des actes. Le dix-huitième siècle philosophique n’admettait même pas la sincérité des fondateurs de religions, et les regardait tous comme des jongleurs. Et, enfin, si Tartuffe reproduit, en somme, les maximes du très sincère et très croyant Escobar, il en change singulièrement le ton, et y mêle (je persiste dans mon impression) une ironie et presque une « blague » de pince-sans-rire.)

J’ai fini de me réfuter. Reste le Tartuffe que j’appelais le « second Tartuffe », et qui est, en réalité, le seul. Oui, Tartuffe est un, et il n’y a qu’un Tartuffe. Seulement l’acteur qui le jouera fera bien de se souvenir, après tout, de la figure qu’a pu prendre Tartuffe dans l’imagination de Dorine : par où il sera conduit à nous mettre sous les yeux un personnage intermédiaire entre le Julien Sorel que nous a