Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/363

Cette page n’a pas encore été corrigée

La Bruyère écrit, par exemple, sans s’étonner : «… Si Troïle dit d’un mets qu’il est insipide, — ceux qui commençaient à le goûter, n’osant avaler le morceau qu’ils ont à la bouche, ils le jettent à terre… » Or, tout se tient ; et j’imagine que ces gens-là étaient moins exacts que nous à se garder de certaines incongruités. Notez que Dorine n’est pas précisément choquée des bruits vilains que fait Tartuffe, mais qu’elle raille surtout la bienveillance avec laquelle Orgon les salue :

 Et, s’il vient à roter, il lui dit : Dieu vous aide !

« S’il vient à roter… », entendez : si cela lui arrive, par hasard… comme cela peut arriver à tout le monde…

Du Tartuffe violemment caricaturé par Dorine, passons au Tartuffe pieusement et béatement dessiné par Orgon.

« Tartuffe, disais-je, n’a aucune finesse… Pour être un goujat et un drôle, il n’en est pas moins un simple d’esprit… C’est par les artifices les plus grossiers, les plus voyants, les plus faciles à percer, qu’il a séduit Orgon. » — Mais, au contraire, Tartuffe paraît fort intelligent en ceci, qu’il a su approprier ses moyens de séduction à la sottise de l’homme dont il a fait sa dupe. Un de mes correspondants me dit que Orgon peut fort bien être un bourgeois notable, avoir été fidèle au roi pendant la Fronde, et