Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/331

Cette page n’a pas encore été corrigée

notre ancêtre, le bon esclave ou gladiateur gaulois que l’auteur ne manque pas de fourrer dans un coin de son drame, et à qui il prête un rôle honorable pour flatter notre patriotisme.

Quant à l’action, elle consiste généralement dans les amours d’une païenne et d’un chrétien (ou inversement) et dans les efforts que fait celui-ci pour amener l’autre à la foi. Si l’homme est esclave et la femme patricienne (ou vice versa), cela, bien entendu, n’en vaut que mieux. Au cinquième acte, la belle païenne est touchée de la grâce et mêle son sang à celui de son compagnon. Et c’est très bien ainsi, et, au surplus, il est très difficile de sortir de là. Pour trouver autre chose, pour concevoir avec émotion et avec profondeur et pour exprimer sans banalité une âme chrétienne des premiers temps, l’âme et le génie d’un Tolstoï ne seraient sans doute pas de trop. Du moins y faudrait-il, à défaut de génie, une longue méditation et plus de « vie intérieure » que n’en a le commun de nos dramaturges.

Les traits que j’ai dits se retrouvent dans Blandine, et ce n’est point un reproche. Voici les inquiets à la façon de notre vieille Leuconoé, les romantiques chercheurs d’idéal : c’est Attale et Æmilia,

  Altérés d’inconnu, toujours inassouvis…
  Enivrés, et rêvant encore quelque chose !…

Voici le stoïcien, et c’est Épagathus ; l’épicurien, et c’est Lucien de Samosate ; le politique étroit,