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en de mauvais sentiments, nous ait été apportée par une gazette dont l’emploi ordinaire est de défendre ce qui nous reste du vieil ordre social et, spécialement, l’aristocratie du nom et celle de l’argent et leurs conjonctions si intéressantes…

Une fortune de cent quatre-vingts millions, si elle n’a pas été mal acquise, n’a pu être acquise pourtant que par la spéculation, qui est une forme du jeu et qui, étant la recherche du gain sans travail, est, aux yeux d’un chrétien, sur la limite extrême des choses permises. Je ne dis rien de plus et ne vous répéterai pas la phrase de Bourdaloue sur les commencements des grandes fortunes. Et c’est pourquoi, outre un naturel sentiment de compassion pour les pauvres, cette dame éprouva sans doute le besoin de racheter ce qu’il pouvait y avoir, non certes de souillé et d’injuste, mais, forcément, de gênant pour une âme haute, et de pas du tout vénérable et de pas du tout évangélique, dans l’origine, quelle qu’elle ait été, d’une opulence aussi démesurée. Et il la faut louer d’avoir eu cette idée-là ; car enfin « rien ne l’y forçait », et des personnes aussi riches qu’elle ne l’ont pas eue.

Et donc, dans les vingt dernières années de sa vie, je crois, cette dame consacra, fort intelligemment, de quinze à vingt millions à des fondations de bienfaisance. Qu’est-ce à dire ? Cela vaut la peine d’être précisé.

Cette dame devait avoir, il y a vingt ans, cinq ou