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Il ne croit, pas, et cependant !… Du moins, il aime ardemment ce qu’il ne croit pas tout à fait, et qu’il voudrait croire. Il est comme sont aujourd’hui beaucoup d’entre nous : il a la piété sans la foi. Il songe :

— Que l’image de Notre-Dame de Lourdes ait été uniquement créée par le désir de Bernadette, qu’importe ? Elle a consolé et guéri de pauvres âmes et des corps souffrants ; elle a fait connaître à de bonnes personnes des minutes ineffables, de ces minutes où l’on vaut davantage, où l’on vit hors de soi, où l’on communie dans un même sentiment avec des milliers d’autres êtres. Et c’est là un bénéfice assez clair. Et puis, que savons-nous ? Ce qu’on appelle miracle n’est sans doute qu’une dérogation aux lois naturelles que nous connaissons, par conformité à d’autres lois que nous ne connaissons pas. Il est vrai qu’alors ce ne serait plus proprement le miracle… Ou bien n’y a-t-il point des phénomènes qui, tout en restant « naturels », — tels que l’hallucination de Jeanne d’Arc ou de Bernadette, — ne s’expliquent pourtant que par quelque chose d’inexplicable, par une force divine cachée dans une âme ?…

Et ne dites point : « À peine un malade sur mille a été guéri ; et pourquoi celui-là ? » Qu’importe, si l’âme croyante reconnaît à son Dieu, et à Celle qui lui porte nos prières, le droit de paraître agir arbitrairement ? On pardonne tout, pour ainsi parler,