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rant que toute la catholicité exalte son nom. En se figurant les magnificences sorties d’elle, et qu’elle ne verra jamais, la candide religieuse a un mouvement d’orgueil, vite réprimé et pleuré. Mais cela nous a valu des pages d’une couleur vibrante et d’une émotion profonde.

Du petit jardin de son cloître, sœur Marie-Bernard retourne en esprit dans Lourdes transformée. Elle assiste à l’une des grandes journées : supplications de toute une multitude, prières presque furieuses, sommation de la souffrance humaine à la pitié divine, arrachement du miracle trop avare : «… Au signal des prêtres, les pèlerins s’agenouillent, se prosternent, et par moments ils demeurent immobiles, les bras en croix, comme un peuple de suppliciés… L’ostensoir passe et un frisson agite les malades. Les fronts se mouillent, les paupières battent. Un éclopé, pas loin de soeur Marie-Bernard, travaille à remuer sa jambe inerte ; un hydrocéphale balance sa tête avec un gloussement qui doit être une prière. Et, seuls vivants dans un pauvre paquet d’os et de muscles ankylosés, noués en boule dans une corbeille, les yeux d’une rachitique roulent, désorbités, effrayants du désir de vivre, de la volonté de guérir… » Mais il faut tout lire.

Enfin, le poème d’Émile Pouvillon est tout pénétré d’évangélisme, de partialité pour les petits, de défiance à l’égard de la société bourgeoise et des « autorités constituées », de doutes sur le bienfait de la