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coup en Beauce, ou même en Sologne. Mais les montagnes, c’est la terre qui touche au ciel et qui s’y mêle déjà. Surtout au crépuscule : «… Le jour meurt…, les limites des choses se dissolvent. Il n’y a plus de certain que les sommets, comme des escaliers pour le rêve. Bernadette regarde. Ce qu’elle aime habite par là : le Bon Dieu, la Sainte Vierge. Oh ! se hausser sur la pointe des pieds, voir un peu ! »

La petite sainte ne subit que des tentations humbles comme elle : une brebis rétive qui l’induit presque en colère, des fraises sauvages qui sont tout près d’éveiller sa gourmandise, les rubans et le dé du colporteur qui la mènent à deux doigts du péché de coquetterie. Et elle conçoit aussi un paradis à sa portée. Ce n’est qu’un paysage de la terre, allégé, angélisé, un paysage avec des fleurs, des arbres, des clochers et des noms de paroisses, et des angélus, et des cérémonies, et des processions ; et les saints et les élus continuent d’y faire ce qu’ils ont fait ici-bas, — comme les ombres des morts dans l’île des Cimmériens, avec plus de joie seulement. Car imaginer, c’est, inexorablement, se souvenir : et de quoi Bernadette se souviendrait-elle ?

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Le bon hagiographe Pouvillon a pieusement extrait de cette histoire miraculeuse tout ce qu’elle comportait de poésie, d’humanité et d’évangélisme.