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amis même attendaient à peine de lui. À ne considérer (s’il se peut) que la forme, j’ai eu l’impression que sa parole, directe, énergique, vibrante — merveilleusement claire — luttait sans désavantage contre l’énorme flot, épandu en nappe, de l’éloquence de M. Jaurès.

M. Paul Deschanel est, dès maintenant, un de ceux qui sont le plus capables d’agir sur les autres hommes par le discours.

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Mais l’évolution de sa pensée politique est plus méritoire encore.

Il pouvait vivre et mourir « centre gauche », s’immobiliser dans une attitude de « sagesse » et de « modération » clairvoyante, ironique et totalement stérile. Or, le premier parmi les politiques de son éducation et de son monde, il a proclamé qu’il n’y a plus de centre gauche ; qu’il ne faut plus qu’il y en ait, non plus que de parti radical ; que cela ne répond plus à rien ; et que ce qu’il faut fonder, c’est un grand parti national, un large torysme, généreux, humain, hardi aux réformes, — en face du socialisme révolutionnaire.

En même temps, M. Paul Deschanel rompait avec les économistes classiques. Leur idéal est de réduire au minimum l’intervention de l’État, par égard pour la liberté des individus. Mais cela suppose peut-être un régime où l’État n’imposerait aux individus