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c’est le monde considéré comme le champ de bataille de Dieu et du démon ; c’est la foi au surnaturel continu, au miracle chronique, à l’action directe et personnelle de Dieu sur les âmes et au jeu de la réversibilité des mérites.

Ces prodiges s’opèrent par la prière, l’oraison méthodique, la confession, la communion. L’action divine se traduit, chez l’homme et la femme, par des signes sensibles et corporels. La chasteté, la sainteté sont des états de la chair. Et c’est pourquoi le vocabulaire et le style de Durtal ont pu rester aussi concrets, aussi brutaux dans l’expression des phénomènes de la vie mystique que jadis dans la peinture de la vie immonde.

Le haut-le-cœur de son naturalisme l’a jeté au mysticisme ; mais on a cette impression qu’il demeure le même homme. D’autant mieux qu’il a commencé par être un converti du plain-chant et de l’art du moyen âge, un converti par les sens. — Sa chasteté n’est peut-être qu’un moment singulier de son impureté, et son tragique catholicisme qu’un moment de sa curiosité de sentir.

Ce point, Durtal pourra-t-il s’y fixer ? Que vaut sa conversion ? On a vu des prostituées prises tout à coup d’une horreur physique insurmontable pour leurs besognes habituelles. L’abus de leur corps avait totalement aboli en elles le désir : apaisées, endormies, amorties, angélisées, la seule approche de l’ancien péché les eût fait s’évanouir d’épouvante.