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des Satires et des Épîtres ne ressemblent guère davantage à ceux d’un Andrieux ou d’un Viennet. Ils rappelleraient plutôt, par la liberté et l’ingénieuse dislocation du rythme, les fantaisies prosodiques de Mardoche ou d’Albertus : je parle sérieusement. Joignez qu’Horace a, le premier, introduit dans la poésie latine les plus belles variétés de strophes grecques, sans compter certaines combinaisons de vers qui lui sont, je crois, personnelles. En sorte qu’il fait songer à Ronsard infiniment plus qu’à Boileau.

Secondement, il n’est pas d’animal plus timide ni plus esclave de la tradition qu’un chansonnier gaulois ou un retraité qui traduit Horace. Or le véritable Horace fut, en littérature, le plus hardi des révolutionnaires. Il traita les Ennius, les Lucilius et les Plaute comme Ronsard et ses amis traitèrent les Marot, les Saint-Gelais et les auteurs de « farces » et de « mystères ». D’esprit plus libre, d’ailleurs, que les poètes de la Pléiade, Horace fut, à tort ou à raison, ce que nous appellerions aujourd’hui un enragé moderniste. O imitatores, servum pecus ! et Nullius addictus jurare in verba magistri, sont des mots essentiellement horatiens.

Enfin, rien n’est plus plat ni plus borné que la sagesse d’un chansonnier bachique ou d’un rimeur de l’école du bon sens. Or, le véritable Horace a bien pu se qualifier lui-même, par boutade, de pourceau d’Épicure : vous savez que l’épicurisme n’est nulle-