Page:Lemaître - Les Contemporains, sér7, Boivin.djvu/109

Cette page n’a pas encore été corrigée

snobs du précieux. Cathos et Madelon sont proprement des snobinettes et les aïeules authentiques des dames bizarres qu’on voit dans les couloirs du théâtre de l’Œuvre. « C’est là savoir le fin des choses, le grand fin, le fin du fin », est une phrase de snob et même d’esthète. Madelon fait cette dépense d’admiration à propos de l’impromptu de Mascarille : elle la ferait aujourd’hui à propos de quelque poème symbolique en vers invertébrés et s’entendrait tout juste autant. Le snobisme littéraire des filles de Gorgibus se complique d’ailleurs du snobisme mondain et de celui de la toilette, ou plutôt s’y confond ; car c’est du même esprit qu’elles jugent les vers de Mascarille et ses canons ou sa petite oie. Bref, elles sont complètes.

Une autre espèce de snob, c’est le marquis de la Critique de l’École des Femmes : snob d’Aristote, qu’il a découvert dans l’abbé d’Aubignac, et des trois unités : car les trois unités d’Aristote, qui ne sont pas dans Aristote, furent une nouveauté, une mode, « le dernier cri », avant d’être une vieillerie ; et le marquis les défend dans le même sentiment et avec la même compétence que les conspuera tel naïf gilet rouge de 1830.

Lorsque la jeune cour délaissa le vieux Corneille pour l’auteur d’Andromaque et de Bajazet, il y eut, n’en doutez point, les snobs de Racine. Et il y eut, au siècle suivant, les snobs de la philosophie, ceux de l’anglomanie, ceux de la sensibilité et de l’amour