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« Celui-ci gagnera le ciel… » Et moi, je voudrais monter sur une tour, et crier d’une telle voix que tous les chrétiens qui sont dans le monde puissent l’entendre : « Oh ! mes frères, mes frères, priez pour moi, je vais périr ! » Mais, si mon âme est faible, elle a du moins embrassé une loi forte ; si elle penche à de vils désirs, elle aime pourtant une loi sainte et pure ; si je me rends coupable dans mon cœur, du moins je ne veux point devenir la pierre où trébuche le pied de l’innocent. Je ne suis point la voix qui gâte le peuple ; je condamne mes fautes et je ne cherche pas, en les justifiant par d’abominables théories, à faire des complices et des victimes…

Continuellement, chez lui, sous l’auteur on retrouve l’homme, et cela est un charme.

Une autre séduction, pour nous, de son œuvre de polémiste, c’est que, catholicisme mis à part, il montre souvent un esprit plus libre, plus « avancé », et — faisons-nous ce compliment — plus rapproché du nôtre que ses adversaires habituels, les routiniers du parlementarisme et de l’impiété bourgeoise. Tandis qu’il s’attache à la vérité éternelle, maintes fois il rencontre la vérité de demain, la vérité généreuse et hardie. Héraut d’une minorité vaincue d’avance, honnie, enserrée d’hostilités croissantes, son rôle fut constamment un rôle de protestation, et son attitude générale est, comme nous avons vu, celle de la révolte. Or, cela ne nous déplaît point. Ce catholique a passé sa vie à combattre quantité de despotismes et d’hypocrisies, et nul n’a plus fréquemment ni plus fortement parlé au nom de la