Page:Lemaître - Les Contemporains, sér6, 26e mille.djvu/407

Cette page n’a pas encore été corrigée

quante ans un lieu commun : mais soyez persuadés que ce lieu commun n’est jamais hors de propos. La tolérance est une vertu excessivement difficile. Elle est plus difficile, pour quelques-uns, que l’héroïsme. On parle de la tolérance comme d’un devoir qui ne fait plus question ; elle est inscrite dans le catéchisme républicain ; tout le monde se figure être tolérant. Personne, ou presque personne ne l’est, voilà la vérité. Prenez-y garde, notre premier mouvement, et même le second, est de haïr quiconque ne pense pas comme nous. La différence des opinions a amené dans le passé plus de massacres et peut amener encore plus de troubles et de malheurs que la contrariété des intérêts. Ce charmant Voltaire, à qui il faut beaucoup pardonner, définissait à merveille et chérissait la tolérance : mais il voulait faire mettre à la Bastille les gens qui n’étaient pas de son avis. C’est pour des différences d’opinion bien plus que pour la conquête du pouvoir que les hommes de la Révolution se sont envoyés à l’échafaud : et cependant ils étaient d’accord sur les choses essentielles, l’amour de la patrie et l’amour de l’humanité. Et aujourd’hui même… je suppose que vous avez tous assisté à une séance de la Chambre ? ou, simplement, que vous lisez les journaux ?

Vous lisez sans doute aussi les jeunes Revues. Pratiquons, mes chers camarades, la tolérance en littérature. Que ceux qui ont de vingt à trente ans