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sable. Et c’est pourquoi, dans les derniers livres de Maupassant, lentement, le surgit amari aliquid fait son œuvre.

Au reste, le naturalisme a deux grandes ennemies : la douleur et la mort. Et il ne sert de rien de dire que ce qui est doit être, qu’il n’y a rien à expliquer. Pour que la philosophie du Cas de Mme  Luneau ou même de Marroca fût le vrai, il faudrait que la douleur fût absente du monde, et qu’on pût ne jamais songer à la mort. Mais on souffre ; et, par la porte de la souffrance, entrent la réflexion, la curiosité, l’inquiétude et l’appréhension de l’inconnu et, sous une forme ou sous une autre, l’idéalisme, et le rêve, et des besoins d’expliquer ce qui échappe aux sens…

À partir d’un certain moment, cela est visible, Maupassant s’attendrit. Son observation s’attriste, — et s’affine aussi, à mesure qu’elle s’étend. Et, à mesure que son cœur s’amollit et que s’y ouvre la divine fontaine des larmes, il apprend aussi la pudeur.

D’un livre à l’autre, les âmes qu’il nous peint se compliquent et, en même temps, s’élèvent en dignité. De plus en plus il paraît compatir aux objets de ses peintures, et de plus en plus il semble se plaire à nous décrire des passions et des sentiments de telle espèce, que, de les comprendre et de les aimer comme il le fait, cela seul prouverait qu’il a dépassé, — sans trop savoir d’ailleurs où il va, — ce naturalisme rudimentaire par où il avait débuté si tranquillement. Fort comme la mort dit un amour « fort