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comique : c’est le sentiment de la nature, c’est la reconnaissance des droits de la passion, c’est l’esprit de révolte, c’est l’exaltation de l’individu : toutes choses dont les germes, et plus que les germes, étaient dans la Nouvelle Héloïse, dans les Confessions et dans les Lettres de la Montagne… Dans cette circulation des idées, on sait de moins en moins à qui elles appartiennent. Chaque peuple leur impose sa forme, et chacune de ces formes semble successivement la plus originale et la meilleure.

Ce n’est donc qu’un moment que je note et, qui sait ? combien fugitif ! Cette inquiète septentriomanie, que durera-t-elle ? Ne commence-t-elle point à languir déjà ? Et au surplus, pour en revenir au règlement présent de cette espèce de compte de « doit et avoir » ouvert entre les races, ne resterait-il pas à chercher si le piétisme d’Eliot, l’idéalisme contradictoire et révolté d’Ibsen, le fatalisme mystique de Tolstoï sont nécessairement quelque chose de supérieur soit à l’humanitarisme, soit au réalisme français ? Qui affirmerait que notre ardeur de foi scientifique et de charité révolutionnaire, médiocrement intérieure et plutôt tournée aux réformes sociales, ne compense pas, même aux yeux de Dieu, l’aptitude plus grande des peuples du Nord à la méditation et au perfectionnement intérieur ? Qui jurerait enfin que, largement et humainement entendue, la philosophie positiviste, pour l’appeler par son nom, et, si vous voulez, la philosophie de Taine, celle qui